En faisant du tri dans mon PC, je suis tombe sur un texte tire de la revue Inforespace (numero 108, de 2004), que j'ai trouve assez interessant, et dont je retranscris ici une partie. Il ne s'agit pas de parler de la question des OVNI en particulier, c'est valable pour n'importe quoi de maniere beaucoup plus generale.
« Étudier la question des OVNI c’est amorcer un changement de paradigme dont on sait qu’il est semblable aux révolutions ». Beaucoup d’hommes - même parmi les scientifiques - ne veulent pas changer les idées qui sont à la base de leur vision du monde. « Une (nouvelle) idée n’est pas acceptée pour la part de vérité qu’elle contient, mais en fonction de sa capacité à être en phase avec les idées dominantes ou à la mode. La propension à l’aveuglement face à des phénomènes perturbant les représentations consensuelles de la réalité génère une désinformation particulièrement pernicieuse ». Cela peut même prendre la coloration d’un devoir missionnaire ou de croisade, comme le montre « le combat idéologique de certains groupes, se réclamant du rationalisme, pour qui la question des OVNI est l’ombre menaçante de l’irrationnel et de l’obscurantisme guettant nos sociétés en crise ».
Une attitude critique vis-à-vis de toute sorte d’idées farfelues et les courants ésotériques qui traversent notre société actuelle est indispensable (NDLVD: c'est tout particulierement le cas en ce moment!), mais cela implique aussi que nous devons être capables de sens critique vis-à-vis de nous-mêmes. C’est plus difficile que de critiquer les autres. Il importe, en particulier, de ne pas mettre tout dans le même sac. Il faut discerner ce que nous ne comprenons pas de ce qui est faux, à cause de contradictions logiques et/ou de faits observés (...) C’est particulièrement déplorable pour des scientifiques. Je citerai comme exemple le cas du professeur Harald Lesch, astronome à l’observatoire de Munich. Il anime avec brio une émission régulière à la télévision bavaroise, où il explique de nombreux problèmes de type astronomique d’une manière très pédagogique et compétente. Mais parfois, il pense devoir s’opposer à ce que le phénomène ovni soit pris au sérieux. Dans l’émission de la nuit du 22/23 janvier 2004, il traitait de la question « sommes-nous seuls dans l’Univers ? » C’est une bonne question, mais la réponse ne l’était pas. Elle faisait état des résultats négatifs du programme SETI, sans considérer la possibilité qu’il peut être inutile pour des extraterrestres de nous mettre au courant de leur existence au moyen de signaux EM, envoyés à partir de planètes lointaines. Le professeur Lesch supposait que toutes les observations d’ovnis doivent résulter d’erreurs de perception ou d’interprétation. Il affirmait en particulier que les ovnis observés au cours de la vague belge étaient des avions ultra légers, en s’appuyant sur le livre de Werner Walter (UFOs Die Wahrheit, 1996). Celui-ci n’a jamais fourni la moindre preuve de cette assertion. Il n’a même pas fait d’enquêtes sur place.
Certaines personnes semblent avoir besoin de croire ou posent comme postulat qu’il est impossible que des extraterrestres puissent venir nous visiter. Par conséquent, ils sont obligés d’admettre que tout ce qui pourrait le prouver n’est pas réel. À leurs yeux, il faut que ce soit illusoire. Ce qui me choque, c’est qu’un scientifique de la qualité du professeur Lesch ne soit pas plus critique vis-à-vis de lui-même et qu’il utilise sa tribune pour propager une idéologie non scientifique (...) J’ai toujours dit que l’hypothèse ET n’est pas démontrée, mais elle est plausible quand on se base sur les faits observés et on doit analyser ceux-ci d’une manière scientifique. Pourquoi le professeur Lesch ne peut-il pas le dire ? Ce serait une occasion pour parler de problèmes non résolus et montrer ce qu’est une démarche réellement scientifique.
Ce qui semble incroyable est quand même possible. Pour illustrer ce fait, nous pouvons considérer le cas du docteur Ignaz Semmelweis. Bien que d’origine hongroise, il termine en 1844 ses études de médecine à Vienne. Il est alors nommé assistant du professeur Johann Klein qui dirige une des deux cliniques de la maternité de l’Hôpital général de Vienne. C’est celle qui est réservée à l’enseignement, mais Semmelweis constate que le taux de mortalité par fièvre puerpérale y est quatre fois plus élevé que dans la clinique où la maternité est essentiellement du ressort des sages-femmes. Le jeune médecin recherche dès lors les causes de cette anomalie. Il passe tout en revue, mais c’est la mort du Dr. Jacob Kolletschka qui finit par focaliser son attention. Etant médecin légiste, celui-ci s’était coupé avec son scalpel au cours d’une autopsie. Cela ne concernait que son doigt, mais il développa une fièvre foudroyante, tout à fait semblable à celle des femmes qui étaient victimes de fièvre puerpérale. Il en mourut et l’autopsie confirma l’identité des symptômes.
Or, chez le professeur Klein, le personnel de la clinique entrait souvent en contact avec des cadavres. Bien qu’on eut soin de se laver les mains avant de procéder à des examens, il subsistait une odeur cadavérique. Semmelweis se dit alors qu’au cours des accouchements, il pouvait y avoir un transfert sanguin de particules infimes, venant des cadavres. Il exigea dès lors que tout le personnel se désinfecte soigneusement au chlorure de chaux, avant de s’occuper d’un accouchement ou de s’approcher d’une femme ayant accouché. Le taux de mortalité tomba de 18 à 1,2 %. Aujourd’hui, nous savons que l’agent principal de la fièvre puerpérale est le streptocoque, mais ce microbe pathogène ne fut identifié qu’en 1880, par Louis Pasteur. L’asepsie et les antibiotiques modernes ont pratiquement fait disparaître cette terrible maladie, mais l’idée de Semmelweis a été combattue, malgré les faits observés.
En décembre 1847, le professeur Hebra, responsable de l’importante revue de la Société médicale de Vienne, y publie un rapport détaillé sur la découverte du jeune médecin. Son article est intitulé : « Expériences très importantes concernant l’étiologie de la fièvre puerpérale dans les maternités. » En avril 1848, il ajoute que des confirmations de la théorie de Semmelweis sont venues de l’étranger, mais pour que cette découverte soit pleinement validée, il prie gentiment tous les directeurs de maternités d’entreprendre des expériences et de communiquer les résultats pour confirmer ou infirmer la proposition, car si elle était correcte, elle serait historique.
N’oublions pas que cela signifierait aussi que les médecins furent eux-mêmes responsables des nombreux décès de jeunes mères. Ce serait dramatique et donc tout à fait inconcevable. Au lieu d’étudier le problème posé d’une manière objective, on se met à critiquer et surtout à ridiculiser le jeune docteur Semmelweis. Le professeur Klein le boute dehors, mais il peut entrer au service du professeur Bratsch, gérant la maternité des sages-femmes. La mortalité par fièvre puerpérale y tombe alors à 0,23 %. Du jamais-vu. Sous l’instigation de Klein, le Ministre révoque Semmelweis. En mai 1850, celui-ci se défend au cours d’une réunion de la Société médicale de Vienne, en répondant point par point à chacun des arguments de ses opposants. Il se fait huer. Les « sceptiques » comme on dirait aujourd’hui, sont persuadés d’avoir raison et en outre, qu’il est de leur devoir de protéger leur noble profession contre tout charlatanisme de ce genre.
Semmelweis est obligé de quitter Vienne. Il se réfugie à Budapest, où il continue à accumuler des arguments qu’il présente finalement dans un livre (Die Ätiologie, der Begriff und die Prophylaxis des Kindbettfiebers, 1861). D’après lui, la fièvre puerpérale est due à une contamination externe, mais d’éminents médecins (...) contredisent sa théorie. Pour Scanzoni, par exemple, la fièvre puerpérale résulterait d’une dégénérescence des globules rouges. D’après von Rottenau, elle serait due à des influences météorologiques. Pour d’autres médecins, elle viendrait d’erreurs de diététique, de locaux trop chauds, etc. Emporté par l’amertume, Semmelweis accuse les accoucheurs d’être des assassins s’ils continuent à nier la nécessité d’une bonne asepsie. Le dédain et le manque de rationalité de ses confrères le dépriment et en 1865, il est interné dans un asile de fous. Il y meurt à cause d’une petite blessure, contractée juste avant son internement, lors de l’autopsie d’une femme morte de fièvre puerpérale.
Une biographie a été constituée par Robert Kertesz (Semmelweis – Der Kämpfer für das Leben der Mütter, 1943). Mais ce sont seulement les recherches menées par Georg Sillo-Seidl (Die Wahrheit über Semmelweis, 1978) qui ont révélé que le médecin gêneur fut amené dans l’asile sous de faux prétextes, qu’on ne s’occupa pratiquement pas du mourant et qu’on s’abstint d’examiner la cause de sa mort (...)
Décidément, il arrive que des idées soient rejetées injustement, parce qu’elles paraissent inacceptables, sans se préoccuper de ce qu’on aurait dû faire pour établir la vérité.
La plupart des êtres humains applaudissent ou fustigent un même propos selon de qui il émane...
RépondreSupprimerKami