vendredi 28 août 2015

L'histoire de l'animesong

Un generique est indissociable de la serie qu'il accompagne, ne serait-ce deja que parce qu'il la presente, c'est le premier contact que le telespectateur a avec elle.

Jusqu'au debut des annees 80, les paroles mettaient en scene le personnage principal (ou robot, dans le cas d'une serie de mechas), ce qui accentuait la synergie entre generique et anime. A partir de Cat's Eye (1983), si cette tendance perdure sur les series shonen et de mechas, on assiste parallelement a un nouveau type de chansons, qui n'ont plus qu'un rapport plus ou moins eloigne avec l'oeuvre associee. Et a partir du debut des annees 90, les animesongs "qui font animesong" disparaissent en large majorite, pour laisser la place a des morceaux "normaux" de type pop. Il n'est meme pas rare que la chanson existe AVANT l'anime, et que ce dernier ne serve que de "sponsor" pour booster les ventes de CD... (on l'a vu a plusieurs reprises sur Inuyasha notamment) Il faudra attendre presque une decennie pour voir le retour de l'animesong "classique", mais remis au gout du jour, principalement grace a JAM Project. Mais nous n'en sommes pas encore la.

Les tous premiers generiques d'anime etaient generalement interpretes par des choeurs d'enfant sur un type de musique qui resonne de nos jours definitivement comme d'un autre age, comme Tetsujin 28.

 
Tetsujin 28

En gros jusqu'en 1972, l'opening etait dynamique, rythme, tandis que l'ending etait plutot du genre ballade (comme Devilman). Et puis arrive Mazinger Z, et le genre super robot qui va dominer toute la decennie. Cette fois, l'ending est de meme type que l'opening, a tel point qu'ils pourraient presque etre interchangeables. Ceci dure jusqu'en 1977 avec Voltes V. Pour la premiere fois, un opening de robot anime est interprete par une femme - Mitsuko Horie en l'occurrence - il n'y en aura pas d'autre avant MIO sur Dunbine en 1983, et l'ending est beaucoup plus doux. Peu apres, quand suivront Zambot 3, Gundam, et Ideon, ce sera carremment dans le registre du melancolisme/pessimisme, et cette tendance va durer un certain temps, tout du moins dans la SF.

 Devilman
 Mazinger Z

Les annees 70 sont dominees par 4 noms: Ichiro Mizuki (1er titre: Genshi Shonen Ryu en 71), Isao Sasaki (Gatchaman en 72), Masato Shimon (idem), et Mitsuko Horie (Kurenai Sanshiro en 69). A eux quatre, ils doivent peut-etre interpreter pas loin de 80 a 90% des generiques d'anime... Un peu comme, toutes proportions gardees, Bernard Minet et Claude Lombard en France sur une periode 88-91. On ne peut pas non plus passer sous silence Koorogi 73 et Columbia Yurigagokai, qui sont en fait les noms des chorales d'enfants, qu'on entend dans la plupart des chansons de l'epoque.
Ce que la plupart d'entre vous ignorent sans doute, c'est que les covers en disques n'etaient pas rares a ce moment-la. On trouve ainsi des versions Shimon de Mazinger Z ou Grendizer, ou Sasaki sur Mazinger Z egalement.

Les animesong cultes de cette decennie sont: Mazinger Z, Gatchaman, Cutie Honey, Yamato, Candy Candy, Galaxy Express (mais plutot le generique du 1er film, plus que la serie), ainsi que le theme de Lupin Sansei. Les Japonais quarantenaires les connaissent autant que le generique de Capitaine Flam pour un Francais du meme age. Candy fut meme le 1er animesong a se vendre a plus d'un million d'exemplaires.

 Candy Candy

J'en profite pour faire une petite digression sur les OST. Jusqu'au milieu des annees 70, les musiques n'etaient pas editees. Les maisons de disques pensaient que ca n'interesserait personne, et que les 45 tours des generiques suffisaient. On a bien eu un album sur Yamato en 74, mais il s'agissait de reprises symphoniques, et non des BGM originales. Or, les fans commencaient a reclamer. Junji Fujita, employe chez King Records, specialise dans les CD d'anime, tenta de sortir l'OST de Zambot 3 en 1979 et... le resultat du etre satisfaisant puisqu'a partir de ce moment-la, la plupart des anime virent leur bande-son editee en 33 tours (et plus tard en CD). Certaines oeuvres anterieures a 79 eurent cette chance apres-coup (comme Grendizer en 1983, soit 7 ans apres la fin de la serie!), pour d'autres il faudra attendre une version CD parfois 20 ou 30 ans plus tard... (l'OST de Candy doit sortir cette annee (2015), soit 38 ans apres!)
King Records fonde en 1981 le sous-label Starchild, specialise dans les bande-son d'anime. Fujita s'en occupera jusqu'en 1985, puis quittera la boite pour creer la societe Youmex, qui editera notamment generiques et OST de Nadia.


A partir du debut des annees 80, le nombre d'artistes explose, la plupart n'etant pas sepcialises en animation, contrairement aux 4 tenors de la decennie precedente, qui vont d'ailleurs se faire beaucoup plus discrets pour Mizuki et Horie. Sasaki et Shimon quittent carrement la scene. Et evidemment, c'est la que va surgir le fidele successeur de Mizuki ("l'Homme aux Mille Generiques"), je veux bien sur parler de Hironobu Kageyama. Deja installe dans le monde de la musique depuis quelques annees, il debute doucement avec une insert song de Southern Cross, ou des generiques d'oeuvres avec peu de succes comme Transformers Headmasters; il s'en sort mieux avec le sentai et les generiques de Changeman (84) et Maskman (86). Il commence vraiment a percer avec le 2eme generique de Saint Seiya (Soldier Dream) en 87, et SURTOUT Dragon Ball Z en 89, qui va vraiment lui faire rencontrer un immense succes.
Un autre nom qui emerge est celui de Akira Kushida, mais qui est plutot specialise en tokusatsu, notamment avec Gavan.

Saint Seiya
Dragon Ball Z

Les annees 80 connaissent une incroyable diversification en matiere d'animesongs. Les sonorites sont beaucoup plus pop, plus rock, on teste de nouvelles idees, on fait parfois appel a des artistes anglo-saxons (Vifam, City Hunter, Galient), les idols aussi se mettent a l'animesong... (Urusei Yatsura par exemple)
L'opening de Cat's Eye (83) est le 1er generique a finir numero 1 a l'Oricon (le Top 50 nippon), et 5 semaines de suite s'il vous plait, pour un total de 820 000 exemplaires vendus. L'autre generique qui va rester dans les memoires, lui aussi tire d'un manga de Tsukasa Hojo, est Get Wild, le 1er ending de City Hunter (87), qui a eu droit a d'innombrables reprises depuis 30 ans...

Il serait trop difficile d'etablir une liste complete des animesongs les plus populaire des eighties, mais outre les deux sus-cites, on pourra notamment ajouter: Urusei Yatsura, Miyuki, Saint Seiya, Captain Tsubasa, Dragon Ball et Z, Hokuto no Ken, Z Gundam, Maison Ikkoku, Touch, Kinnikuman...

 
 Cat's Eye
City Hunter

Les annees 90 elles, connaissent un changement de cap flagrant. Sans doute la meilleure decennie musicalement parlant, mais helas, comme j'en parlais plus haut, c'est la disparition presque totale de l'animesong "qui fait animesong", et le regne quasi-total de la J-Pop "classique". C'est aussi l'accentuation d'un phenomene apparu a la fin de la decennie precedente, a savoir les chansons de doubleurs, Megumi Hayashibara en tete.
Les titres dont on se souvient: Nadia, Slam Dunk, Ruro ni Kenshin, Conan, Evangelion...

 
 Nadia
Evangelion

L'animesong est en danger. C'est ce qu'a pense - a juste titre - Ichiro Mizuki. Alors, en l'an 2000, s'associant avec Hironobu Kageyama, Masaaki Endo, Rika Matsumoto, et Eizo Sakamoto (ce dernier venant du groupe Animetal, groupe specialise dans la reprise heavy metal d'animesong des annees 70-80), il fonde le JAM Project (Japan Animationsong Makers Project). D'un pur point de vue musical, ce n'est finalement guere different de ce que faisait Kageyama tout seul, mais un tel melting-pot d'artistes talentueux ne pouvait que donner un resultat detonnant. Cela etant, JAM se cantonne presque exclusivement au genre du robot anime.

Shin Mazinger

Notons par ailleurs que depuis une vingtaine d'annees, les anime singers de la grande epoque donnent de nombreux concerts, ou bien evidemment le public a surtout entre 35 et 50 ans. Les generiques qu'ils ont entendus etant enfant resonneront toujours dans leur coeur, associes a l'image de tel ou tel anime. On ne pourra pas en dire autant helas des enfants qui ont grandi dans les annees 90 ou 2000. Mais ce genre de concerts est voue a disparaitre tot ou tard, vu l'age des protagonistes... Sasaki a 73 ans et s'est retire du metier, Mizuki 67 (il a la meme date de naissance que mon pere, annee incluse :) ), Horie 58, Kageyama 54... Ils ont encore la peche mais d'ici a 15 ans maximum, ce sera surement termine :(

Kageyama et Sasaki chantent Getter Robot!

Je termine avec le Top 5 des single les plus vendus, le classement est assez etonnant.
Itoshisato setsunasato kokoro tsuyosato (Street Fighter 2 Movie), 1994: 2,020 000
Odoru Ponpokorin (Chibi Maruko-chan), 1990: 1,640 000
Mienai Chikara (Jigoku Sensei Nube), 1996: 1,230 000
Sekai ga owaru made ha (Slam Dunk), 1993: 1,220 000
Mezase Pokemon (Pokemon), 1997: 1,112 000

Certains titres tres populaires ont fait des ventes bien moindres, mais ne perdons pas de vue que les titres de J-Pop pure attirent aussi un public qui ne regarde pas d'anime.
Cat's Eye, 1983: 820 000
Galaxy Express 999 (Movie), 1979: 666 000
Zankoku na tenshi no These (Evangelion), 1994: 400 000
Ai oboete imasu ka? (Macross Movie), 1994: 272 000
Uchu senkan Yamato (Yamato), 1974: 256 000
Touch, 1985: 247 000

Street Fighter 2 Movie

Pour enfin en conclure avec cet article, je dirais que s'il ne fallait garder qu'un seul generique, celui qui symbolise le mieux l'animesong, et le plus connu au Japon, ce serait sans doute Yamato de Isao Sasaki. Je l'ai par exemple deja entendu lors de la kermesse de l'ecole maternelle de mes gosses, autant dire que c'est pas leur generation :)

 
Yamato

1 commentaire: